Le monoxyde de carbone (CO)

Parmi les 4000 substances contenues dans la fumée du tabac, peu sont aussi dangereuses que le monoxyde de carbone. Formé d'un atome de carbone [C] et d'un atome d'oxygène [O], ce gaz agressif et dangereux [CO] est très différent du gaz carbonique ou dioxyde de carbone [CO2], qui ne présente pas de danger particulier pour la santé.

Lorsqu'on brûle quelque chose (bois, mazout, charbon, essence), c'est principalement du CO2 qui est produit, mais des traces de CO sont toujours présentes. En effet, du CO se forme chaque fois que l'apport d'oxygène s'avère insuffisant, même pendant une fraction de seconde. Si on veille à ne pas aspirer la fumée directement, ce n'est pas si grave. Mais les choses se compliquent dans le cas de la cigarette, où on aspire volontairement la fumée.

Car le monoxyde de carbone est un poison. Une fois aspiré, comme tous les gaz il traverse sans encombre la fine paroi qui sépare les poumons de la circulation sanguine. Une fois arrivé dans le sang, il se lie très fortement à l'hémoglobine et bloque son activité. Or, le travail habituel de l'hémoglobine est d'amener l'oxygène des poumons vers le reste du corps. Ainsi, l'aspiration de monoxyde de carbone a pour effet de réduire la quantité d'oxygène disponible pour les muscles, le cerveau, le cœur, etc.

La fumée dans l'air ambiant contient également du CO. C'est l'une des raisons pourquoi il ne faut jamais fumer en présence d'enfants (encore moins si on est enceinte!). C'est aussi l'une des principales justifications pour interdire la fumée du tabac au travail et dans les lieux publics.

Chez les fumeurs réguliers, le taux d'hémoglobine inactivée pour cause de monoxyde est de 5% à 15% environ. Chez les non-fumeurs, ce taux est beaucoup plus bas, mais jamais tout à fait nul puisque le métabolisme naturel produit une certaine quantité de monoxyde de carbone, et tout un chacun inspire un peu de ce gaz en raison de la pollution atmosphérique.

Le CO est mesurable dans l'air expiré, au moyen d'un petit appareil simple et peu coûteux. Il suffit de souffler dans un tuyau, et on obtient immédiatement un résultat en "ppm" (parts par million). Chez une personne qui a fumé dans les minutes ou les heures qui précèdent, les niveaux de CO sont de l'ordre de 15 à 20 ppm. Chez les non-fumeurs, le niveau varie de 1 à 4 ppm environ. Les non-fumeurs exposés passivement à la fumée présentent en général des taux intermédiaires, entre 5 et 10 ppm.

Que l'on soit fumeur actif ou passif, le problème principal est que le CO se fixe rapidement sur l'hémoglobine et qu'il s'y maintient pendant des heures. Ainsi, le corps restera partiellement sevré en oxygène, même lorsqu'on aura écrasé sa cigarette et/ou quitté la pièce enfumée. Outre son caractère préoccupant pour la santé, cette particularité est utilisée par les médecins et les chercheurs afin de déterminer si les personnes participant à un programme d'arrêt du tabac se sont réellement abstenues de fumer.


Références:
Breath carbon monoxide as an indication of smoking habit. ET Middleton, AH Morice. Chest. 117(3), pp. 758-763. (2000).
http://publications.chestnet.org/pdfaccess.ashx?url=/data/journals/chest/21941/758.pdf

Validation of self-reported smoking status by simultaneous measurement of carbon monoxide and salivary thiocyanate. A Morabia, MS Bernstein, F Curtin, M Berode. Preventive Medicine 32(1), pp. 82-88 (2001).
http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0091743500907795

Evaluation of exposure to carbon monoxide associated with passive smoking. WK Jo, JW Oh, JI Dong. Environmental Research 94 (3), pp. 309-318 (2004).
http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S001393510300135X